Bissière à la cathédrale de Metz

 

BISSIERE A LA CATHEDRALE SAINT-ETIENNE DE METZ...

voir également : http://lenouveaucenacle.fr/roger-bissiere-creuse-le-ciel

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Tympan nord

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Tympan sud

Les deux verrières opposées de Bissière   complètent à merveille  les espaces intermédiaires laissées par  les autres chefs d'oeuvre de cette "Lanterne du Bon Dieu" qui compte pas moins  de 6500 m² de surfaces vitrées. Mais en plus elles  vont    donner    un souffle nouveau  grâce à une  orientation   biblique jusqu'à présent  insoupçonnée.

C'est pourquoi il  ne parait  pas présomptueux  d’affirmer que ces  deux baies vitrées   vont devenir en quelque sorte   source et  sommet de toute l’architecture de lumière de cette cathédrale.

En effet les verrières de Roger Bissière, rappellent les débuts de la création et notamment ce 4ème jour où apparaissent les deux  luminaires au firmament des cieux pour séparer le jour et la nuit.

« Dieu dit : Qu'il y ait des luminaires dans l'étendue du ciel, pour séparer le jour d'avec la nuit ;  que ce soient des signes pour marquer les époques, les jours et les années ;

et qu'ils servent de luminaires dans l'étendue du ciel, pour éclairer la terre. Et cela fut ainsi. Dieu fit les deux grands luminaires, le plus grand luminaire pour présider au jour, et le plus petit luminaire pour présider à la nuit ; il fit aussi les étoiles.

Dieu les plaça dans l'étendue du ciel, pour éclairer la terre,

 pour présider au jour et à la nuit, et pour séparer la lumière d'avec les ténèbres. Dieu vit que cela était bon.

 Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le quatrième jour. » (Gen. I, 14-19)

Dans ces conditions ces deux vitraux irradient la lumière à l’image de la lune et du soleil grâce à ces deux ouvertures opposées de la cathédrale, l’une issue du tympan nord pour signifier le monde de la nuit et l’autre du tympan sud, pour  celui du jour.

Et par conséquent toute la lecture  des vitraux de cette cathédrale va pouvoir s’interpréter à partir de cette séparation  initiale.

En effet  partout dans  ce lieu et bien plus qu’ailleurs on assiste en permanence    au passage des ténèbres à la lumière, de la mort à la Résurrection :

« Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière sur les habitants du sombre pays, une lumière  a resplendi. » (Isaïe 9,1)

« Le vitrail bleu, couleur de la Vierge Marie chante le Magnificat à la tombée du jour [tympan nord de Bissière].

Le vitrail jaune (ou ocre), symbole de la lumière de la Résurrection, du monde de Dieu, de la joie du salut, de la joie de connaître Dieu [tympan sud de Bissière].

Dans le monde de la Bible, le temps ne s’écoule pas du matin au soir, mais du soir au matin.

Au livre de la Genèse, un refrain ponctue chaque jour : « Il y eut un soir, il y eut un matin. »

 

La direction nous mène vers la lumière du jour, vers la Résurrection « Haec dies » (« Voici le jour ») chante le grégorien » (*)

Les deux vitraux de Bissière où prévalent le bleu dans l’un et l’ocre dans l’autre nous invitent en permanence à contempler la nuit et le jour, la mort et la résurrection.

 

(*) selon Sœur Marie du Monastère St Dominique de Dax –Kim En Joong, vitraux, CIV, Ed. du Cerf, Chartres, Paris, 2008, p.50

 

 Quelques mots sur Roger Bissière:

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Roger Bissière dans l'embrasure d'une porte vers 1960

 

Né en 1886 à Villeréal dans le Lot-et-Garonne, Bissière dès 1910 s’est  très tôt frotté à Paris aux nouvelles tendances de la peinture dont notamment  le cubisme grâce  à l’amitié qu’il   entretenait avec Braque.

Mais il manifesta davantage  son attachement à la peinture de tradition française avec une préférence marquée pour Ingres, Seurat ou Corot  sans toutefois délaisser complétement les expériences cubistes qui marqueront également son style personnel. Il écrit abondamment pendant les années 1920-21 dans la revue « L’Esprit Nouveau »

Il ouvre en 1934 un atelier de fresques avec des élèves qui incarneront comme lui l’école française (l’Académie Ranson) : Gruber, Manessier, Bertholle, Le Moal (pour n’en citer que quelques-uns).

Mais privilégiant toujours son indépendance d’esprit  et un certain  détachement par rapport à la scène artistique parisienne, Bissière se retire dès 1939  à la manière de Cézanne dans sa terre familiale, pour renouer avec ses racines  dans sa maison à Boissierette dans le Lot.

N’ayant pour « confidents que moi-même et quelques vaches paisibles que je menais paître le long des prés et des bois, sous le soleil et les nuages », écrit-il dans sa préface de  l’exposition (« T’en fais pas la Marie.T’es jolie… »1947). Il  est revenu ensuite sur la scène parisienne après la guerre.

Ainsi à  l’instar de Cézanne, Bissière se voit comme le « primitif d’une nouvelle sensibilité ».

Tous ces bleus et ces ocres des vitraux de Metz  proviennent des paysages de sa  retraite du Lot, lui qui rêvait comme Cézanne  de « faire du Poussin sur nature » !

(extraits du travail de Christian Schmitt sur les vitraux de Bissière)