KEITH HARING, être au monde.

 

"être au monde"


A l’instar des autres artistes américains des années 1950 et 1960 qui avaient promu « l’art du réel » (Robert Rauschenberg et Jasper Johns notamment), Keith Haring plongeait lui dans le réel de façon tout à fait inconnue jusqu’alors puisque cette immersion se voulait intégrale voire fusionnelle.

Alors que les autres peintres avaient défini des paramètres et des exemples de réel dans leurs ateliers avec des méthodes et des formes de fabrication industrielle, lui au contraire définissait un rapport au réel qui s’analyse en ses propres termes par « être au monde ».

Ainsi par exemple, le métro devenait par son utilisation personnelle un véritable musée populaire. Tous les matins, il sautait de son lit et avec une boite de craie blanche se précipitait dans les wagons de toutes les lignes qui traversaient Manhattan, de Brooklyn à Harlem. Il était à l’affût des panneaux publicitaires inutilisés recouverts de papiers noirs.

Comme par révélation il fit la découverte de ces espaces vierges en ces termes « Je me suis rendu compte immédiatement que c’était le lieu parfait pour dessiner ». C’est pourquoi la craie s’est révélée le médium idéal grâce à cette « ligne continue » qui a toujours été son objectif d’utilisation : « flux » et « fluidité ».

Tout son art était fait et conçu à partir du réel. Il utilisait les objets du quotidien, les logos publicitaires et toute cette culture BD, déconsidérée par les milieux intellectuels, pour réaliser de véritables fresques comparables à ce que produisait la civilisation égyptienne ou maya.

Son souci de l’authentique va très loin chez lui car lorsqu’il se met à peindre il utilisera même les bâches qui ferment l’arrière des camions plutôt que des toiles traditionnelles !

Cette façon effrontée et sans limites d’embrasser le monde réel est un cas unique dans la peinture contemporaine.

Le monde convoqué par lui bouscule les interdits, les frontières du racisme et de l’intolérance pour porter son message simple et fort de l’amour et de l’amitié universelles. C’est un univers psychédélique empli d’une syntaxe de signes mâtiné par une inspiration issue de la contre-culture, sur fond incessant de hip-hop et de rap.
Par la douceur, l'amour de l'autre et surtout son implication dans le monde de l'enfance (de nombreuses peintures murales dans les écoles ou hôpitaux…), K.Haring est une figure attachante.

Il est resté un enfant de 12 ans avec son air ahuri ne cessant de gesticuler comme un jeune fou intrépide. Trop impatient de changer le monde en le marquant de ses empreintes multiples. Il l'embellit par son univers graphique percutant et enchanteur. En simplifiant à l'extrême les formes et en utilisant des couleurs soutenues et fortes comme le bleu, le vert, le rouge et le jaune. Tout cela permet aux enfants d'entrer directement dans ses œuvres d'autant que les motifs qu'il utilise sont ceux qui leur sont familiers car issus de la BD ou de la culture télévisuelle.

Et sur son pictogramme favori "le bébé radieux" qui devient son logo depuis 1983, il dira lui-même:

"L'année de mes 21 ans, j'ai passé l'été à enseigner l'art dans une maternelle à Brooklyn. C'est de loin l'été le plus gratifiant que j'ai passé de ma vie. Il n'y a rien qui me rende plus heureux que de faire sourire un enfant. La raison pour laquelle mon bébé est devenu mon logo, ma signature, est que c'est l'expérience la plus positive, la plus pure que contienne l'expérience humaine. les enfants personnifient la vie dans sa forme la plus joyeuse.
Les enfants ne s'arrêtent pas à la couleur de peau, ils sont libres de toutes les complications, de la vénalité et de la haine qu'on leur instillera peu à peu par la suite."

Le monde autour de lui devient beau car il est à son image par la fraîcheur de la vérité et la sincérité de son art.
Un art proche sans concession facile d’accès mais profond, simple pour les enfants et trop compliqué pour les adultes !
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Interview par T. Ardisson en 1990 :http://youtu.be/txOJy3S3_VU
 
Voir sur Facebook le groupe sur K. Haring
 
 
Quelques photos de ses oeuvres, ensuite 5 vidéos le concernant et un résumé de sa vie.
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Gamin, Keith Haring écoute Aerosmith, les Beatles, et consomme drogues et alcool. À 18 ans il entreprend des études de graphisme commercial à Pittsburgh puis continue à l'école des Arts visuels de New York. Il s'essaie à autant de disciplines que le collage, la peinture, les installations, la vidéo, etc. mais son mode d'expression privilégié demeure le dessin. À New York, et plus particulièrement dans l'East Village, il découvre la foisonnante culture alternative des années 1980 qui, hors des galeries et des musées, développe son expression sur de nouveaux territoires : rues, métros, entrepôts, etc. Il rencontre des artistes de la vie underground new-yorkaise tels Kenny Scharf et Jean-Michel Basquiat avec qui il devient ami, et organise ou participe à des expositions et performances au Club 57, qui devient le lieu fétiche de l'élite avant-gardiste. C'est à cet endroit que le Bébé rayonnant, un des pictogrammes les plus connus de l'artiste, fut inspiré.

Inspiré par le graffiti, tenant du Bad Painting, et soucieux de toucher un large public, Haring commence à dessiner à la craie blanche sur des panneaux publicitaires noirs du métro de New York. Il grave également des dalles de grès des trottoirs dans l'East Village (elles sont toujours présentes de nos jours). Un photographe, Tseng Kwong Chi, le photographie en permanence, même quand la police l'arrête. Il exécute plusieurs milliers de ces dessins, aux lignes énergiques et rythmées. La griffe Haring, c'est la répétition infinie de formes synthétiques soulignées de noir avec des couleurs vives, éclairantes sur différents supports. C'est un récit permanent où l'on retrouve bébés à quatre pattes, dauphins, postes de télévision, chiens qui jappent, serpents, anges, danseurs, silhouettes androgynes, soucoupes volantes, pyramides ou réveils en marche, mais aussi sexualité et pulsion de mort.

Sa première exposition personnelle a lieu en 1982 à la galerie Tony Shafrazi de New York et rencontre un immense succès public. En 1985 il est invité à participer à la Biennale de Paris. Sa notoriété internationale ne cesse dès lors de s'accroître. Il participe à de nombreuses expositions internationales et exécute de nombreuses commandes prestigieuses. Dans son désir de rencontrer un large public et de rendre son art accessible au plus grand nombre, il ouvre en 1986, dans le quartier de SoHo, son Pop Shop, etc. illustrés par lui même, comme autant d'œuvres « au détail ». Cette démarche très controversée dans les milieux artistiques est néanmoins fortement appuyée par ses amis et son mentor Andy Warhol. Son travail l'amène à collaborer avec des artistes tels que Madonna, Grace Jones, Timothy Leary ou encore William S. Burroughs.

En 1988, il apprend qu'il est infecté par le virus du sida. Il s'engage dès lors fortement dans la lutte contre cette maladie, mettant tout son art et sa notoriété au service de cette cause et de sa visibilité. Il crée à cet effet la Keith Haring Foundation[1] en 1989 qui est chargée de venir en aide aux enfants et de soutenir les organisations qui luttent contre le sida.

Sa peinture est proche du mouvement de la figuration libre. Son œuvre, tel un langage figuré et volubile sur des sujets universels, reste comme l'une des plus importantes de la fin du XXe siècle.

Il a réalisé la fresque de l'Hôpital Necker de Paris.

Keith Haring meurt des complications dues au sida à l'âge de 31 ans, à la fin d'une décennie, en février 1990.

Le marché de l'art a très vite récupéré le phénomène Haring, l'artiste a cependant toujours cherché à démocratiser l'œuvre d'art et à miner son statut élitiste.

Keith Haring a laissé une œuvre où l'innocence cache une réelle inspiration, comme si l'artiste n'avait jamais voulu grandir et qu'il regardait le monde avec des yeux d'enfant pour mieux parler des adultes.

 

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