les philosophes du pape François

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Les philosophes du pape François par Julien Leclercq* dans l'hebdomadaire La Vie du 13/12/2017

 

François philosophe, un essai dirigé par Emmanuel Falque et Laure Solignac, tente d'expliquer les influences philosophiques d'un pape qui considère qu'il n'y a pas d'action sans pensée.

Répondant à Dominique Wolton (Pape François. Politique et société, édition de l'Observatoire) sur les difficultés de l'Église à se faire entendre, le pape François n'hésite pas à faire dans l'autocritique : « Oui, quand on lit certains textes ecclésiastiques, ils disent la vérité, mais c'est terriblement ennuyeux. Ils n'ont pas la joie, la légèreté d'une belle communication. » Des paroles qui témoignent de son attachement aux rapports directs, dépouillés de leurs pesanteurs intellectuelles ou idéologiques. Le pape François, on le sait, privilégie l'action à l'intellectualisme. Mais il demeure bien influencé par plusieurs traditions philosophiques. 

Certes, il n'est pas philosophe comme Jean Paul II, ni théologien comme Benoît XVI, mais dans leur préface, Emmanuel Falque et Laure Solignac notent justement : « Que le pape François ne se réfère pas toujours explicitement à des auteurs ou à des philosophes ne signifie pas (...) qu'il ne les connaît pas, ou seulement de loin. » Et si François n'est pas à proprement parler, un philosophe au sens universitaire du terme, d'Ignace de Loyola à Paul Ricoeur, le saint-père est indéniablement marqué par plusieurs lectures décisives qui constituent des clés pour comprendre son pontificat comme ses encycliques.

De grandes figures religieuses 

Plusieurs grandes figures intellectuelles et religieuses sont ainsi convoquées dans cet essai pour comprendre la pensée du pape François. Certaines sont attendues, comme François d'Assise et Ignace de Loyola, d'autres surprennent comme Paul Ricoeur (1913-2005), décidément omniprésent ces derniers temps, Luigi Pareyson (1918-1991), Miguel de Unamuno (1864-1936) ou Maurice Blondel (1861-1949). Des théories analysées à travers cet essai, nous retiendrons surtout la philosophie de « l'homme capable », chère à Paul Ricoeur. Dans Réflexion faite, Ricoeur souligne : « On pourrait dire que c'est chaque fois en tant qu'homme capable que le sujet de l'agir se révèle accessible à une qualification morale. » Le chapitre VII d'Amoris laetitia est en cela une méditation « ricoeurienne » sur l'éducation morale et la formation de la liberté. L'homme est capable du bien... à condition de le cultiver.

" Certaines figures surprennent comme Paul Ricoeur, Luigi Pareyson, Miguel de Unamuno ou Maurice Blondel. "

La pensée de l'un et du multiple, du philosophe italien Luigi Pareyson, est également essentielle pour saisir les textes de François sur la vérité et ses interprétations, notamment à travers la Joie de l'Évangile. Blaise Pascal, dont François souhaite la béatification, aurait également mérité de figurer dans cet essai ; mais les cinq études qui le composent - parfois exigeantes - permettent de cerner la construction intellectuelle du souverain pontife pour qui les idées ne doivent pas entraver l'exercice de la charité mais les inspirer et les accompagner. Dans son chapitre consacré à Miguel de Unamuno, Miguel García-Baró le rappelle justement : « La nouveauté du pontificat de François, c'est l'élan décidé et constant (...) à mettre exemplairement en pratique les conséquences quotidiennes de la vérité évangélique qu'a développées la théologie (et en particulier celle du siècle dernier) avec une telle éloquence ».

 

* Julien Leclercq est  le fondateur et le  rédacteur en chef de la Revue en ligne Le Nouveau Cénacle http://lenouveaucenacle.fr

 

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