Jeff KOONS, la rétrospective
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26 nov.-27 avril 2015
Paris 4e. Centre Pompidou
Jeff Koons est devenu depuis le milieu des années 1980 une figure incontournable de l'art contemporain, reprenant en cela le flambeau d'Andy Warhol. Car Jeff Koons demeure aujourd'hui une personnalité artistique et médiatique de premier plan, qui a toujours su gérer et contrôler son image, sa notoriété et la diffusion de son œuvre. Jeff Koons incarne ainsi l'image de l'artiste businessman par excellence, entrepreneur, manager et promoteur richissime. Il est l'artiste vivant le plus cher au monde, avec son œuvre Ballon Dog (magenta) vendue à près de 50 millions de dollars en 2013.
Il est aussi un artiste mondialisé, présent au vernissage de sa rétrospective au Centre Pompidou, ou récemment à la Fondation Vuitton, dont les œuvres sont présentées à la Fondation Pinault de Venise ou à l'entrée du Guggenheim, avec son immense sculpture florale représentant le chien Puppy. Il fut également le premier artiste vivant à exposer dans les grands appartements du château de Versailles en 2008. On le connaît encore pour son mariage sulfureux avec l'actrice pornographique et parlementaire italienne, la Cicciolina (1991-1994).
La personnalité de Jeff Koons intrigue donc. Et dérange souvent. On le trouve trop parfait, lui qui se présente invariablement dans son impeccable costume gris, avec son franc sourire et sa conversation agréable. On juge son art trop vulgaire, trop kitsch, trop tape-à-l'œil. Sa réussite financière scandalise la plupart, ou attise l'admiration de certains. Les magazines d'art critiquent ouvertement son œuvre et sa personne. Mais chacun lui offre la une de son dernier numéro, espérant par là doper ses ventes grâce aux polémiques que déclenche systématiquement l'icône controversée de l'art contemporain.
Toutefois, il est à remarquer que l'œuvre de Jeff Koons a été découverte par l'un des regards les plus avertis du XXe siècle, l'épouse du célèbre galeriste new-yorkais Leo Castelli, Ileanna Sonnabend, dans le milieu des années 1980, alors que Jeff Koons travaille comme courtier à Wall Street pour payer le coût de production faramineux de ses projets artistiques. Pourtant, la première série d'œuvres qu'il présente, les Inflatables, n'a rien de monumental ou d'excessif. Il s'agit de simple ready-mades s'inscrivant dans le sillage de Marcel Duchamp. En effet, Jeff Koons récupère quelques jouets gonflables et les présente sur des miroirs. Les jouets colorés (des fleurs ou un lapin rose aux grands yeux bleus dévorant une carotte) parodient les figures et couleurs flashy du Pop art, qui domine le marché de l'art américain à cette époque. Surtout, le travail de Jeff Koons s'enracine dans l'iconographie de la culture populaire, dont il ne détachera d'ailleurs plus jamais. Mais ces œuvres gonflables, remplies d'air, ne risquent-elles pas de se dégonfler et de tomber à plat un jour ou l'autre?
La série Pre-New délaisse cette atmosphère ludique pour nous plonger dans un univers domestique et robotisé. Jeff Koons y présente des appareils d'électro-ménager: grille-pain, bouilloire, et des aspirateurs qu'il place dans des vitrines éclairées par des néons. D'une part, cette mise en scène fait référence aux devantures des magasins de la société de consommation. D'autre part, Jeff Koons y tourne en dérision les néons de l'art minimal (on pense notamment à Dan Flavin).
Jeff Koons se fascine alors pour les biens de consommation et la publicité. La série Equilibrium illustre à travers des affiches de promotion de la marque Nike, le rêve d'ascension sociale chez les jeunes Noirs, qui s'identifient aux basketteurs de la reluisante NBA, véritables héros des temps modernes. A ces affiches viennent répondre des sculptures de bronze imitant des articles de sport: un bateau gonflable, un équipement de plongée sous-marine. Le geste de Jeff Koons se fait ironique: le bateau de bronze coulerait aussitôt si on le mettait à l'eau, et l'équipement de plongée noierait celui qui oserait l'endosser. La pesanteur du bronze est toutefois contrebalancée par les aquariums de Three Ball Total Equilibrium Tank, où sont suspendus des ballons de basket défiant les lois de la physique.
Une fois n'est pas coutume, une portée sociologique et critique apparaît dans la série Luxury and Degradation, où Jeff Koons reproduit sur toile des campagnes publicitaires d'alcools. L'artiste souligne que le vocabulaire esthétique qui y est décliné change selon la catégorie sociale à laquelle la boisson se prédestine. Plus la pub vise une classe riche, plus son iconographie tend vers l'abstraction. On se dit alors que les premières œuvres de Jeff Koons, apparaissant dans le milieu des années 1980, contiennent une certaine charge subversive envers son époque, ses idéaux, la société de consommation, la publicité, et les formes d'art en vogue (Pop art et ...